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Nous avons demandé au Dr Mathieu Versée, Médecin du travail et Conseiller scientifique chez Cohezio, d’identifier pour nous les risques inhérents au froid excessif et de dispenser quelques conseils bien utiles.

 



Dr Versée, l'hiver est souvent synonyme d'une augmentation du nombre de maladies. En quoi le froid constitue-t-il un risque pour la santé?

"En hiver, les personnes souffrant d'arthrose et de rhumatismes peuvent être sujets à une aggravation de leurs symptômes. De manière générale, on assiste également à une augmentation de la fréquence des lombalgies, des douleurs au niveau des épaules, de la nuque, ainsi que des luxations et entorses.

Le froid peut également avoir un effet négatif sur les maladies cardio-vasculaires (tension artérielle) et les voies respiratoires (asthme, différents types d'infections respiratoires,...).

La peau peut aussi être touchée par certaines affections liées au froid. Citons le phénomène de Raynaud qui se manifeste par une diminution de la circulation sanguine aux extrémités (mains et/ou pieds). Les doigts prennent successivement une coloration blanche, bleue et enfin rouge (lorsqu'ils se réchauffent). On appelle communément cette affection "le syndrôme des doigts morts". La douleur qu'il provoque est particulièrement intense. Ce phénomène apparaît surtout en cas de travail prolongé avec des outils vibrants (comme des marteaux-piqueurs).

Le cas des engelures aux pieds ou aux mains est dû, lui, à une réaction trop lente des petits vaisseaux sanguins par rapport aux variations de température (notamment lors du réchauffement), ce qui provoque une congestion des petits vaisseaux capillaires. Des tuméfactions bleues-rouges, douloureuses et qui démangent fortement apparaissent alors: ce sont les fameuses engelures.

En soi, le froid peut également causer une augmentation du nombre d'accidents de travail, due notamment à la diminution de la dexterité. Pour ce qui est des accidents ayant lieu sur le trajet domicile-lieu de travail, les conditions hivernales sur la route comportent bien entendu aussi leur lot de risques supplémentaires."

Comment les travailleurs en extérieur peuvent-ils se prémunir contre ces conséquences fâcheuses ?

"L’employeur est tenu de réaliser une analyse des risques des ambiances thermiques (Titre 1er du livre V du code du bien-être au travail). Lorsque les températures ambiantes risquent d’excéder les valeurs d’action légales, l’employeur établit au préalable un programme de ‘mesures techniques et organisationnelles’, qui sera soumis pour avis aux conseillers en prévention compétents et au comité pour la prévention et la protection au travail.

Il faut d’abord et avant tout impérativement adapter sa tenue vestimentaire aux conditions climatiques. Rappelons ici aussi que le vent et la pluie peuvent faire baisser considérablement la température ressentie et donc renforcer en grande partie les effets que j’ai décrits plus haut.

Optez pour des vêtements résistants au vent et à l'eau. Il est préférable de se changer en cours de journée si les vêtements (chaussettes, gants, bonnets,...) et les chaussures sont mouillés. Il faut porter au minimum trois couches de vêtements. Toutes ces couches, et en particulier la couche en contact avec la peau, doivent pouvoir épouser le corps (attention au bas du dos!) lors des différents mouvements. Les autres couches de vêtements seront de préférence pourvues de tirettes pour permettre d'adapter l'évacuation de la transpiration en fonction de l'activité physique. plus le froid sera marqué et plus les couches de vêtements devront être épaisses. La première couche (mince) peut être doublée ou on peut prévoir un vêtement en polaire épais qui retient une grande quantité d'air et de chaleur. Pour les activités de longue durée dans la pluie et le vent, on conseillera le port de manteaux imperméables à l'eau et perméables à l'air, confectionnées en fibres synthétiques."

D’autres mesures sont-elles nécessaires ?

"Il faut éviter au maximum d’être en contact avec des surfaces froides, d’où l’importance des genouillères, dont l’efficacité sera renforcée par une plaque isolante, placée à même le sol. Le port de gants chauds est conseillé. Les poignées des marteaux-piqueurs devront par ailleurs être de bonne qualité et antichocs.

Essayez également de limiter la durée d’exposition au froid en alternant le travail en plein air et le travail d’intérieur par exemple. Et enfin, n’oubliez pas qu’une boisson chaude peut faire des miracles.

Plus le travail sera léger et plus le froid sera difficile à supporter. Veillez dès lors à ce que votre personnel ne reste pas trop longtemps assis ou debout au froid. "

Existe-t-il d’autres obligations légales à respecter lorsque les températures sont froides ?

"Outre le programme de mesures techniques et organisationnelles, le titre 1er du livre V du code du bien-être au travail relatif aux ambiances thermiques fixe les mesures à prendre en cas de froid excessif dans des situations spécifiques.

Entre le 1er novembre et le 31 mars, l’employeur doit prévoir des installations de chauffage dans les lieux de travail en plein air, dans les locaux ouverts ou, le cas échéant, dans un autre espace où les travailleurs pourront se réchauffer pendant les pauses. Ces installations de chauffage seront activées en cas de nécessité et dans tous les cas, lorsque la température est de moins de 5°C.

Autre obligation à ne pas négliger : l’information. Les travailleurs occupés régulièrement à des tâches en extérieur doivent recevoir les informations et la formation nécessaires en ce qui concerne les risques que cela peut engendrer."

Un traitement particulier doit-il être réservé aux travailleurs en extérieur en matière de surveillance de la santé ?

"Un travailleur qui doit régulièrement effectuer un travail à l’extérieur peut effectivement être soumis à une surveillance spéciale de la santé. On peut en effet déduire de l’analyse des risques que ce travailleur est exposé à un ‘risque particulier’. "

Jusqu’ici, nous nous sommes principalement intéressés au travail physique extérieur. Qu’en est-il des travailleurs de bureau ? Sont-ils suffisamment protégés en cas de grand froid ?

"Ces travailleurs sont également protégés par la chaude couverture qu’offre la législation. Le titre 1er du livre V du code du bien-être au travail relatif aux ambiances thermiques impose en effet le respect de températures minimales, en fonction de la nature et de la lourdeur du travail.

Pour le travail en intérieur, les températures minimales sont de 18°C pour le travail dit ‘très léger’ et de 10°C pour le travail ‘très lourd’. Nous conseillons toutefois de ne pas descendre sous les 20°C pour le travail ‘très léger’ (le travail de bureau classique).

N’oubliez pas de lutter contre la nuisance que représentent les courants d’air. Le confort thermique dépend en effet non seulement de la température, mais aussi de facteurs tels que la vitesse de l’air, la température de l’air et le taux d’humidité relative, facteurs pour lesquels il existe aussi des normes. Bien entendu, le climat intérieur est aussi en grande partie tributaire de la manière dont a été construit le bâtiment.

De manière générale, nous conseillons aux entreprises de se doter d’une procédure claire qui fixe les mesures (techniques et organisationnelles) à prendre en cas de froid d’origine climatique."

 

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