back-arrow 29 octobre 2025

Toujours connectés, jamais concentrés : la nomophobie mine la productivité

Quand la peur d’être déconnecté nuit à notre efficacité et notre bien-être professionnel.

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La nomophobie (contraction de « no mobile phone phobia« ) désigne l’anxiété liée à l’absence de son téléphone portable ou le fait de ne pas pouvoir l’utiliser. Batteries vides, absence de réseau ou simplement oubli de son téléphone deviennent une véritable source de stress et d’anxiété.

Cette dépendance à la technologie et à son téléphone est fortement alimentée par le phénomène du FOMO (Fear Of Missing Out) qui consiste à avoir peur de manquer une information, un événement ou une expérience sociale. La peur constante de passer à côté de messages ou notifications soi-disant importantes. Cette peur de « rater quelque chose », trouve son origine dans la pression sociale et informationnelle qui nous pousse à une surconsommation de contenu et donc renforce le phénomène de nomophobie.

Ce trouble, encore peu reconnu, touche pourtant de nombreux salariés. La peur de rater un appel, un mail ou une notification pousse certains à rester connectés en permanence, même en dehors des horaires de travail.

Dans un monde professionnel où l’instantanéité est valorisée, cette dépendance numérique peut sembler anodine. Mais elle affecte à la fois la performance, la concentration, la santé mentale… et le droit à la déconnexion pourtant inscrit dans le Code du Bien-être au Travail

Comprendre la nomophobie : au-delà d’une simple habitude

Consulter son smartphone en moyenne 50 à 100 fois par jour est devenu un réflexe banal. Mais lorsque l’idée même d’être séparé de son téléphone génère du stress, voire de l’angoisse, il ne s’agit plus d’un simple automatisme, mais d’une véritable dépendance.

 

 

 

Cette dépendance s’explique par plusieurs mécanismes sous-jacents :

 

  • La dopamine : chaque notification déclenche une petite dose de satisfaction et de plaisir, comparable à celle ressentie lors d’une récompense. À la longue, ce phénomène crée un véritable réflexe addictif et une forme de dépendance qu’on retrouve également dans l’usage de drogue.
  • Le renforcement intermittent : les notifications n’arrivent pas de manière prévisible, comme c’est le cas dans un jeu de hasard. Ce caractère aléatoire stimule le cerveau et entretient la compulsion de vérifier son téléphone « au cas où ».
  • Le besoin de connexion sociale : recevoir un message ou un like procure le sentiment d’être relié aux autres, même à distance, comblant ainsi temporairement un besoin d’appartenance ou de reconnaissance et permettant de diminuer le sentiment de solitude.
  • La conception des applications : les plateformes sont volontairement pensées pour capter notre attention – défilement infini, rappels, ou contenus personnalisés – et rendent la déconnexion très difficile.

 

Chez les professionnels, cette peur est souvent amplifiée par :

 

  • La pression de performance : ne pas répondre rapidement peut être perçu comme un manque d’engagement.
  • La culture de l’hyper-disponibilité : mails, messageries internes et appels s’enchaînent, même après 18h.
  • L’impossibilité de déconnecter, même pendant les congés ou le week-end.

Les conséquences de la nomophobie sur le travail

Si elle peut sembler banale, la nomophobie entraîne des effets bien réels sur l’organisation du travail, la productivité et le bien-être.

 

Quelques impacts concrets :

 

  • Baisse de la concentration, de la mémorisation et de l’efficacité : les interruptions fréquentes (pour répondre à un mail, appel téléphonique, …) et la fragmentation des tâches empêchent la réalisation de tâches en profondeur.
  • Surcharge cognitive : l’attention sollicitée en permanence surcharge le cerveau, crée du stress et est source d’épuisement.
  • Surcharge d’informations ou infobésité : Celle-ci a un impact sur la capacité d’analyse, engendrant des difficultés à prendre des décisions, à prioriser, à détecter l’urgence.
  • Anxiété et troubles du sommeil : l’exposition continue aux écrans retarde l’endormissement.
  • Stress chronique : la peur de « rater quelque chose » alimente une tension mentale constante.
  • Fatigue visuelle : les écrans sollicitent intensément les yeux, provoquant picotements, maux de tête et sensation de vision floue en fin de journée.
  • Réduction des relations interpersonnelles réelles : On privilégie les relations par écrans interposés plutôt qu’en face à face.
  • Diminution de la séparation entre sphère privée et professionnelle : Diminution du temps de récupération physique et psychique du travailleur.
  • Altération des relations professionnelles : répondre à son téléphone en réunion ou vérifier ses mails en échangeant avec un collègue nuit à la qualité des interactions.

 

Quatre bonnes pratiques :

 

1. Faites d’abord un diagnostic des usages numériques dans votre équipe et le niveau de nomophobie.

 

Commencer par une analyse des pratiques actuelles de vos collaborateurs qui va vous servir à ouvrir un dialogue, pas à contrôler. Pour ce faire, vous pouvez vous inspirer de l’échelle de Yildirim & Correia (2015), adaptée en version professionnelle qui propose quelques questions types évaluées sur une échelle 1 à 5 ou utiliser notre outil d’auto-diagnostic (voir infra).

 

2. Fixez un cadre collectif de “bon usage” du numérique.

 

Une fois les constats établis, le rôle du manager est de co-construire des règles claires et partagées qui renforceront l’adhésion et réduiront la pression implicite :

 

Réunissez vos collaborateurs afin de définir ensemble :

 

  • des plages de disponibilité communes ;
  • des modes de communication adaptés à l’urgence ;
  • des engagements collectifs (ex. : pas de mails après 19h sauf urgence, Slack en “ne pas déranger” le week-end).

 

Rédigez une charte de « droit à la déconnexion » pendant les heures de travail.

 

  • Encouragez les pauses sans écran (ex. : pauses déjeuner 100 % offline).
  • Créez des « zones sans smartphone » dans les espaces de travail.

 

Montrez l’exemple en tant que ligne hiérarchique.

 

Posez des limites claires aux communications professionnelles en dehors des heures de travail.

 

Domaine Bonnes pratiques
Emails Programmer les envois différés hors horaires ; préciser dans la signature : “Les messages envoyés en dehors des heures de travail n’appellent pas de réponse immédiate.”
Messageries instantanées Créer des canaux “pro” et “social” distincts ; définir ce qui relève de l’urgence réelle. Inviter vos collaborateurs à désactiver les le week-end.
Téléphone pro Éviter les appels en dehors des horaires ; proposer un téléphone personnel distinct.
Réunions Proscrire les réunions virtuelles avant 8h30 et après 17h ; limiter leur durée.
Interdire les téléphones en réunion, sauf cas urgent.

 

3. Evaluez la situation.

 

  • Faire un point régulier (ex. : une fois par trimestre) sur la charge numérique.
  • Former l’équipe à l’hygiène numérique (gestion des notifications, priorisation, outils d’organisation).
  • Valoriser la déconnexion comme un levier de performance, pas comme un retrait.

 

4. Montrez l’exemple.

 

Le management par l’exemplarité est décisif :

 

  • Ne pas répondre aux messages le soir/week-end.
  • Mettre en silence ses notifications.
  • Afficher clairement ses temps de déconnexion.

Si le manager respecte ces règles, l’équipe se sent autorisée à le faire aussi.

L’outil d’auto-diagnostic

Vous vous posez la question de savoir si vous (ou vos collègues) êtes nomophobe ?

Voici quelques indicateurs pour savoir si vous (ou quelqu’un de votre entourage professionnel) êtes potentiellement concerné(e) :

 

Comportement Oui Non
Je consulte mon téléphone dès le réveil.
Je ressens de l’anxiété quand je n’ai pas mon téléphone à portée.
Je vérifie mes mails professionnels plusieurs fois en soirée ou le week-end.
Je réponds immédiatement à chaque notification.
Je garde mon téléphone à côté de moi en réunion ou en entretien.
Je coupe rarement (voire jamais) mon téléphone, même la nuit.

 

Résultats :

 

  • 0 à 2 réponses « Oui » : votre usage est raisonnable.
  • 3 à 4 « Oui » : vous êtes probablement en train de développer une dépendance.
  • 5 à 6 « Oui » : vous présentez un profil nomophobe. Il est temps de reprendre le contrôle.

 

Bonnes pratiques :

 

Incitez vos collaborateurs à réaliser ce test lors de sessions bien-être ou de formations à la gestion du numérique. Pour un test approfondi, veuillez consulter le test de Thierry le Fur.

Petit récapitulatif pour réduire la nomophobie au travail

La nomophobie n’est pas une fatalité. Il est possible d’agir, à la fois individuellement et collectivement, pour mieux gérer notre rapport au téléphone.

 

 

Bonnes pratiques :

 

Organisez une « semaine sans notifications », ou des ateliers de digital détox pour faire émerger de nouveaux réflexes collectifs.

 

Vers une culture du numérique plus responsable :

 

La nomophobie révèle un déséquilibre plus large : celui de notre relation au temps, à la performance et à la disponibilité. En entreprise, repenser notre usage du smartphone est un levier concret pour améliorer à la fois le bien-être des collaborateurs et l’efficacité collective.

Car se déconnecter, ce n’est pas fuir ses responsabilités : c’est s’offrir les conditions d’un travail plus serein, plus durable… et finalement, plus humain.

 

Découvrez ici nos formations à la déconnexion :

Déconnexion : sensibilisation des travailleurs

Formation déconnexion, outil de management responsable

Prévention et gestion de stress par les techniques de respiration